Certificat en enquête et renseignement : une première cohorte dès cet automne
- Préparer son parcours universitaire
Daisy Le Corre
Vous avez peut-être déjà eu l’occasion de vous poser ces questions avec plus ou moins d’intérêt : « Est-ce que telle ou tel employé fait autre chose sur ses heures de bureau? Est-ce qu’elle ou il est allé en congrès avec ses partenaires et ses enfants aux frais de l’entreprise? Où était-il ou était-elle hier matin? Où est passée la marchandise que j’avais commandée? » Autant de questions triviales qui invitent à ne s’en poser qu’une seule : « Y a-t-il matière à mener une enquête? » C’est ce que nous a expliqué Fabienne Cusson, responsable de programmes à la FEP, qui s’occupe du certificat en criminologie depuis 20 ans et qui a développé le certificat en victimologie avant de lancer, depuis peu, celui en enquête et renseignement.
« La compétence de faire des enquêtes devrait être développée dans tous les domaines. Ce qu’on propose avec ce certificat, ce n’est pas seulement de l’enquête policière! Si vous n’êtes pas policier, vous ne ferez probablement jamais d’enquête policière », confie Fabienne Cusson qui déconseille également ce certificat à celles et ceux qui viennent d’obtenir leur DEC. « Il faut le voir comme un complément de formation. On ne prend pas d’étudiants ou d’étudiantes qui n’ont ni expérience ni études universitaires, ou qui ont seulement un DEC en poche. À moins que ce soit un DEC technique où il y aurait matière à faire de l’investigation. Dans le domaine de la construction, cela pourrait marcher : le métier d’inspecteur de chantier existe, par exemple. »
Les domaines visés sont divers et variés, allant des comptables qui doivent débusquer des fraudes aux journalistes qui veulent fouiller plus loin, autant de profils qui sont les bienvenus dans cette nouvelle formation qui réunit l’essentiel des activités d’enquête.
Ce qui est central lors de la formation dispensée à l’UdeM? Des cours de droit, parfois très spécifiques. « Les étudiants seront amenés à étudier du droit civil mais aussi criminel, pénal ou administratif », indique Fabienne Cusson. « On a également ajouté toutes les techniques spécifiques à l’enquête pour aller chercher des preuves : l’entrevue d’enquête, la perquisition, la saisie, la filature, etc. La gestion d’un réseau d’informateurs ou les données ouvertes collectées sur les réseaux sociaux sont aussi importants », précise la responsable avant d’ajouter que la collecte d’informations issues du big data, ou des mégadonnées, est au programme. « À l’heure actuelle, on a beaucoup de données, mais peu de gens capables d’aller chercher une information précise dans cette masse d’informations pour répondre à une question spécifique. On s’efforce donc de former ces perles rares », raconte la responsable de programme, rappelant au passage que plus de 80% des enquêtes (y compris criminelles) se font à l’extérieur des corps de police.
« La plupart des entreprises, privées autant que publiques, embauchent de plus en plus d’enquêteurs qui ne portent pas toujours ce nom-là d’ailleurs : inspecteur, vérificateur, investigateur, etc. Mais le métier reste le même : il s’agit de rassembler des faits pour répondre à une question. On collige, on organise, on analyse et on présente des faits, c’est cela enquêter. »
Parmi les qualités requises, on note la rigueur et la méthodologie dans un contexte juridique. Mais surtout la capacité à travailler en contexte hostile. « Le métier d’enquêteur ne se passe pas comme sur Netflix! Personne n’est très content de voir débarquer un enquêteur chez soi », rapporte Fabienne Cusson, consciente qu’il faut former beaucoup d’enquêteurs pour n’en garder qu’un ou une. « Les gens se rendent souvent compte, un peu tard, que ce n’est pas si amusant que cela comme métier… Mieux vaut le savoir. Mon conseil à celles et ceux qui hésitent : fermez un peu la télévision et posez-vous les bonnes questions avant de vous lancer. »
Votre fascination pour ce qui pourrait bien se passer dans la tête d’un tueur vous incite à poursuivre en criminologie? Passez votre chemin. « La fascination n’est pas un emploi. Sans compter qu’en réalité, ce n’est pas très fascinant un délinquant : il s’agit souvent d’un individu peu éduqué qui a raté sa vie et qui n’a pas les outils pour réussir autrement. Certains d’entre eux sont aussi aux prises avec des problèmes de santé mentale, de toxicomanie », explique la connaisseuse. « En revanche, ce qu’on peut faire pour résoudre ces problèmes, ça, c’est un emploi! Mais la fascination, c’est un piège. On rentre en criminologie pour devenir un profileur de tueurs en série et on finit fasciné par les graffitis et les incivilités! (rires) »
À l’issue de leur formation, les étudiants et étudiantes devront mener à terme un projet d’intégration, soit le dernier cours obligatoire. Le principe? « Quatre personnes auxquelles on donne un mandat d’enquête partent sur le terrain comme si c’était une vraie enquête à élucider », confie Fabienne Cusson avant d’ajouter qu’un partenariat avec la Faculté de droit et le tribunal-école est déjà envisagé.
Plus d'infos : 514 343-6111, poste 2929 / fabienne.cusson@umontreal.ca
Journaliste, Daisy est une amoureuse des mots et de la vie des gens et a toujours des idées plein la tête! Indiscrétion : elle voue un culte infini à Catulle Mendès, l'auteur qui lui permet d'étudier l'androgynie dans les oeuvres décadentes du 19e siècle. Raison pour laquelle elle poursuit sa recherche en littératures à l’UdeM.